La cuisson au saggar est un procédé où le feu devient à la fois peintre et conteur. Au lieu de me fier uniquement aux émaux, j'enferme chaque pièce dans un récipient en argile – un saggar – avec des matières organiques, des minéraux et d'autres éléments naturels. Dans cette petite chambre, la chaleur transforme tout.
Je rassemble mes matériaux une fois la saison terminée : feuilles mortes, fleurs séchées, gousses ou minéraux altérés par le temps. Ces vestiges de la nature sont disposés autour de la forme en argile, chacun portant sa propre histoire. Sous la chaleur intense du four, ils libèrent leurs couleurs, leurs vapeurs et leurs marques, laissant une trace indélébile à la surface du récipient.
Aucune cuisson ne ressemble à une autre. Une feuille peut brûler jusqu'à devenir légèrement rosée un jour, puis prendre une teinte fumée profonde le lendemain. Le cuivre peut s'épanouir en verts, roses ou violets ; le fer peut laisser des halos rouge rouille ou des tons terreux profonds. Ces variations ne sont pas maîtrisées, elles sont vécues. Le feu décide, les matériaux réagissent, et l'argile enregistre chaque instant de leur rencontre.
Le terme « saggar » vient de « safeguard » (protection), désignant les boîtes protectrices en argile utilisées en Chine dès la dynastie Tang (VIIe-Xe siècle). Ces récipients protégeaient la porcelaine délicate des cendres et des flammes à l'intérieur des fours à bois. Au fil des siècles, l'utilisation du saggar s'est répandue en Asie et en Europe, où il servait principalement d'outil pratique. Au XXe siècle, cependant, les potiers d'atelier ont réinventé le saggar non seulement comme protection, mais aussi comme support de transformation créative, en le remplissant de matières organiques, de sels ou de métaux pour créer des effets de surface uniques.
Pour moi, la cuisson au saggar est une façon d'honorer à la fois les cycles de la nature et l'imprévisibilité de la vie. C'est une collaboration avec les éléments – terre, eau, air et feu – et avec le temps lui-même. Il en résulte des pièces qui portent la mémoire des matériaux rencontrés, préservant la beauté éphémère de la nature sous une forme qui peut être saisie, utilisée et vécue.